Fernand Pouillon, né le 14 mai 1912 à Cancon dans le Lot-et-Garonne, fut un des grands bâtisseurs des années de reconstruction après la Seconde Guerre mondiale en France. Il passe sa jeunesse à Marseille où il fréquente l'École des Beaux-arts avant de poursuivre de 1932 à 1934 des études d’architecture à Paris. Il construit son premier immeuble à vingt-deux ans en 1934 à Aix-en-Provence. Fernand Pouillon entreprend un pari ambitieux à Aix-en-Provence : 200 logements à construire en 200 jours pour un budget de 200 millions de francs. Utilisant la pierre et des plans économiques mais de qualité, Pouillon gagne son pari. En 1953, il renouvelle ce genre de performance en réalisant l'ensemble d'immeubles de Diar-el-Mahçoul à Alger : 1 600 logements réalisés en 365 jours dans un parfait respect du style architectural local et surtout de la notion d'espace urbain. À Alger suivront les ensembles de Diar-es-Saada et Climat de France. En 1961, alors que sont réalisés, sous sa conduite, quelques-uns des plus importants grands ensembles en périphérie de Paris, à Montrouge, au quartier du Point-du-Jour à Boulogne-Billancourt ainsi que la ville nouvelle de Meudon-la-Forêt, il est au cœur d'une affaire judiciaire retentissante suite à la révélation qu'il est également actionnaire de sociétés périphériques du CNL au moyen de prête-noms. En effet, un architecte n'a pas le droit d'être ni promoteur, ni entrepreneur, ou autre activité commerciale en rapport avec le bâtiment. Son ami Jacques Chevallier, l’ancien ministre, député et maire d’Alger qui n’a jamais quitté l’Algérie, l’incite à l’y rejoindre. Fernand Pouillon retrouve donc la maison qu’il occupait au début des années cinquante, la Villa des Arcades, qu’il restaurera. C’est donc l’Algérie qui bénéficiera des compétences de Fernand Pouillon pendant vingt ans, jusqu’en 1984, deux ans avant sa mort. Avec le ministre du tourisme Mohamed Maoui il couvrira le territoire algérien d’hôtels d’affaires ou de tourisme et de complexes balnéaires. Les ministères de la Poste, de l’Enseignement Supérieur, de l’Intérieur, lui confieront aussi des projets. L’amertume de Fernand Pouillon de n’avoir été sollicité pour sa compétence la plus haute, le logement bon marché, ni par la France, ni par l’Algérie, quand les besoins étaient si grands, sera immense jusqu’à sa mort. En 1982 la Biennale de Venise sur le thème de l’architecture dans les pays islamiques rend hommage à son travail, aux côtés de Hassan Fathy, Louis Kahn et Le Corbusier. Alors qu’il achève triomphalement et dans des délais record en juillet 1982 le chantier de l’hôtel El-Djazaïr à Alger (ex-hôtel Saint-Georges), en France les événements se précipitent alors. Fernand Pouillon a bien réintégré le tableau de l’Ordre des Architectes et été élu au Conseil régional de l’Ordre d’Ile de France en 1980 mais la dette fiscale totale datant du CNL lui est toujours réclamée et le montant en est très important. Le Président de la République François Mitterrand aura à cœur d’aider Fernand Pouillon à réintégrer la France et à le réhabiliter en l’élevant au grade d’Officier de la Légion d’Honneur en 1984. Il meurt le 24 juillet 1986 dans son château de Belcastel en Aveyron, une ruine très délabrée mais majestueuse qu’il a restaurée pendant sept ans avec une équipe de maçons algériens.